Furious envisagea de demander à Doug de l’emmener chez Syn, après la rencontre avec l’agent immobilier concernant la location du bâtiment pour leur garage, puis il se ravisa, décidant de se faire déposer au pub. Furi était d’excellente humeur, la meilleure depuis des mois. Il allait enfin être bientôt diplômé, après neuf mois d’études intenses et cela allait porter ses fruits. Il n’aurait pas à travailler dans le garage de quelqu’un d’autre, leur faisant gagner de l’argent. Non, il aurait le sien, enfin, il serait copropriétaire d’un garage, accomplissant ainsi la promesse faite à son père avant son décès.
Jusqu’à maintenant, il n’avait eu aucune nouvelle de son futur ex-mari. Peut-être que Patrick signerait simplement les papiers et le laisserait poursuivre sa vie. Enfin, et ce qui était le plus important, il avait rencontré quelqu’un avec qui il sentait qu’il pourrait nouer une véritable relation. Furi savait que cela prendrait du temps, cependant, il ne pouvait pas ignorer la manière dont Syn le regardait, le suppliait, et le caressait. D’autant qu’il ne pouvait pas nier que le gars avait une fibre protectrice, comme jamais il en avait vue. Personne ne s’était jamais dressé pour lui ou n’avait essayé de le défendre comme Syn, donc il ne redoutait plus que le flic le frappe comme Patrick l’avait fait.
Furi trottina vers l’autre côté de la rue, s’éloignant du pub après que les feux de la voiture de Doug aient disparu à l’embranchement suivant. Il prit l’ascenseur jusqu’à l’étage de Syn, vérifiant une dernière fois ses vêtements afin de s’assurer que tout était parfait. Il retira les mèches coincées derrière ses oreilles, et le reste de sa chevelure s’étala entre ses épaules. Il s’arrêta devant la porte de l’appartement et toqua à plusieurs reprises. Il devait admettre que son estomac était noué. Il n’avait pas eu de premier rendez-vous depuis des années. Plus que ça : il n’était jamais sorti avec un flic. Au contraire, il avait plutôt tendance à les éviter. Bien qu’il n’ait aucun passé criminel, il avait toujours classé les policiers comme des connards homophobes avec des badges qui leur procuraient l’assurance de pouvoir s’en servir pour s’en prendre à quelqu’un si bon leur semblait. Cependant, il savait que Syn était différent.
La dernière pensée de Furi fut interrompue quand Syn ouvrit la porte, paraissant délicieux dans un jean bleu moulant et un simple polo blanc. Une chaîne en or pendait autour de son cou, correspondant parfaitement au diamant carré accroché au lobe de son oreille droite. Furi aimerait qu’il laisse pousser un peu plus ses cheveux. Les mèches sombres du dessus partaient dans tous les sens, ne contenant aucun produit et ils étaient juste assez longs pour les tirer. Les tempes poivre et sel étaient à peine visibles et son bouc, rasé de près. Furi adorait que Syn possède quelques poils prématurément gris, cela lui donnait un air distingué et sexy en diable.
— Hey, toi, dit Syn, avec un petit sourire aux lèvres, appréciant manifestement la manière dont Furi le dévisageait.
— Hey, toi-même.
Furi ne put retenir le sourire qui s’évasa sur son visage. Syn le laissa entrer. Dès qu’il referma la porte, Furi s’approcha de lui, le retournant jusqu’à ce que son dos soit contre le panneau.
— Hey, murmura-t-il à nouveau, contre les lèvres entrouvertes de Syn.
Furi prit les deux mains de son amant, entrelaça leurs doigts et les pressa contre la porte.
— Tu sens bon.
Ses lèvres effleurèrent les joues de Syn, tandis qu’il prenait son visage, le tournant légèrement afin d’enfouir le sien contre son cou. Il sentit que le souffle de Syn s’accélérait pendant qu’il s’appuyait sur lui, provoquant une vague de plaisir un peu plus bas. Syn siffla dans son oreille et Furi sourit.
— Bon sang, tu réponds si bien. J’adore ça.
Il relâcha leurs mains et, immédiatement, Syn leva les siennes pour les glisser dans les longues mèches de Furi.
— Tu aimes beaucoup mes cheveux, non ?
Le gémissement de Syn fut sa réponse et il ondula un peu plus des hanches.
— Réponds-moi.
Furi mordilla le menton de Syn avant de le lécher pour apaiser la légère douleur.
— Oui, beaucoup. Ils sont si doux et ont une si bonne odeur.
La voix de Syn était rauque et profonde, Furi ressentit sa vibration contre son cou. Il mit ses deux mains sur sa mâchoire carrée et posa chastement ses lèvres sur les siennes. Celles de Syn paraissaient fermes, alors qu’elles étaient douces et lisses. L’inférieure était juste un peu plus pleine que celle du dessus, absolument parfaite pour la sucer. Furi frotta les siennes d’avant en arrière, le taquinant et jouant afin de voir comment il allait réagir. Il se sentit victorieux lorsque Syn grogna et se pencha en avant pour approfondir leur connexion. Il recula légèrement, l’obligeant à le suivre.
— Putain, arrête de te foutre de moi ! grogna Syn.
— Je ne le fais pas. Et tu le veux. Accepte-le.
Furi mordit Syn, juste sous la mâchoire. La poigne du flic se resserra sur ses cheveux, pour le maintenir immobile et réclamer sa bouche. Furi l’ouvrit et laissa le détective prendre le contrôle du baiser… pour l’instant. Leurs langues se battirent en duel, presque violemment, la passion de Furi correspondant à celle de Syn. Il laissa sa main errer plus bas, jusque sur le derrière ferme et le serra à travers le jean. Merde ! Il massa lentement ces globes ronds jusqu’à ce que Syn tende son postérieur vers l’arrière, réclamant clairement plus. Furi rompit le baiser, aspirant une grande bouffée d’air, avant de lécher et mordiller le menton de Syn. Une main continuait ses massages tandis que l’autre suivait la raie de ses fesses. Les gémissements et petits cris provenant de son grand flic firent davantage durcir son sexe.
— Bon sang ! siffla Furi. Si nous ne nous arrêtons pas, nous nous passerons de dîner.
— Hein ? murmura Syn, continuant à frotter son visage dans ses cheveux.
— Le dîner. Je meurs de faim.
— Oh, je ne sais pas cuisiner, répondit Syn contre son oreille.
Le rire de Furi était rauque.
— D’accord. Que dirais-tu que nous sortions manger un morceau ?
Furi laissa une main errer sur les fesses de Syn, la glissant plus bas afin de serrer ses testicules, avant de remonter vers la raie à nouveau.
— As-tu une préférence ?
Sa main se resserra sur la nuque de Syn, pendant que l’autre poursuivait son exploration. Il la passa devant, empoignant ses parties, les comprimant jusqu’à ce qu’il entende un grognement tendu et sente ses hanches faire un bond en avant. Il sourit.
— Je t’ai posé une question, Syn.
— Hein ?
Le flic suçait son cou, faisant en sorte que ce soit difficile pour lui également de se concentrer.
Furi tapa les fesses de Syn avant de reculer.
— Manger.
— Oh, ouais… euh… je ne sais pas cuisiner.
Furi sourit tandis que Syn hésitait sur ses mots, essayant de reprendre le contrôle de son souffle.
— Tu l’as déjà dit, déclara-t-il, se retournant pour regarder l’appartement spacieux, mais pourtant vide de Syn.
Il y avait un canapé et un fauteuil inclinable devant une télévision massive dans le salon. Il n’y avait aucune photo ni décoration. Il vit un mur avec une arche qui donnait sur une cuisine de bonne taille, qui semblait toutefois pratiquement vide également.
— Je ne suis pas là depuis longtemps, expliqua Syn, se doutant des pensées de Furi. Je viens juste de recevoir un autre canapé et quelques décorations arriveront bientôt, ainsi qu’un nouveau lit.
Furi se retourna et étudia Syn. Il avait l’air si délicieux se tenant là, tout timide et peu assuré.
— Un nouveau lit, hein ?
Syn haussa les épaules.
— Je disais ça en passant.
— Eh bien, tu devras me faire faire tout le tour quand nous reviendrons après le dîner, déclara-t-il en souriant.
Syn hocha la tête, puis ramassa différents objets sur l’étagère accrochée au mur. Furi le regarda pendant qu’il attachait son badge et glissait une arme dans le creux de ses reins avant de passer son tee-shirt par-dessus.
— Dois-tu toujours porter une arme ?
— Non, ce n’est pas une obligation. Je me sens nu sans, cependant, expliqua Syn, sortant une veste du placard.
— Quelle sorte d’arme est-ce ? Elle semble différente de celle que tu avais hier.
— C’est un Smith et Weston 5906. Elle est mieux dans mon dos si je ne porte pas mon étui. En général, j’utilise mes Glocks pendant que je travaille.
— Combien en possèdes-tu ?
Syn entra dans l’espace personnel de Furi, se tenant nez à nez avec lui.
— Suffisamment.
Furi ricana, ouvrit la porte et Syn verrouilla derrière lui.
— Hey, que dirais-tu de quelques ailes de poulet avec de la bière ?
— Ça me paraît bien.
— Cool. Je connais un endroit très bien appelé “Henry”. Ils ont une sélection des meilleures bières et les ailes sont géniales. On y trouve également des fléchettes et tables de billard.
Furi s’arrêta de parler quand il remarqua que Syn paraissait légèrement plus pâle.
— Hey, que se passe-t-il ?
— Euh… rien.
Ils montèrent dans le bon vieux pick-up de Syn et Furi était assis, silencieux, tout en l’observant.
— Nous y allons ou quoi ?
Furi plissa les yeux, examinant le profil de Syn. Sa mâchoire était crispée et son cou était rouge. Que diable… ?
— Ouais, allons-y.
— Bien.
Syn pensait qu’il allait être malade. Ce n’était pas de chance que Furi ait suggéré le seul endroit de la ville où la moitié du département de police aimait traîner. Bordel, même ses lieutenants fréquentaient cet endroit. Ce serait cruel de soumettre Furi aux piques inappropriées de Day aussi tôt. Il n’avait pas vraiment peur d’être vu en compagnie d’un homme, il n’était juste pas du genre à livrer sa vie privée au public. Ou ai-je peur ? Merde ! Il ne pensait pas que Furi accepterait que leur liaison reste secrète. Il avait été très clair à ce sujet lorsqu’ils étaient dans l’allée.
Syn agrippa fermement le volant et son pied appuya sur l’accélérateur. Peut-être… juste peut-être, qu’il n’y aurait personne de familier au bar. Il conduisit sous la limite de vitesse et sentit les yeux scrutateurs de Furious examiner son profil. Il tenta de sourire et d’empêcher ses mâchoires serrées de montrer sa nervosité.
Malgré ses efforts, ils arrivèrent à destination en ce qui lui semblait être un temps record. Furious sortit et attendit que Syn se dirige lentement vers l’entrée.
— Es-tu sûr que tout va bien ? demanda-t-il, ennuyé.
— Ça va. Vraiment. Bien. Parfait, répondit Syn, se mettant un coup de pied mental pour passer pour un idiot.
Furi prit sa main dans la sienne et il fallut chaque once de volonté de Syn pour ne pas la retirer. Bien entendu, il est pour les démonstrations publiques d’affection. Furious ouvrit la porte entra, comme s’il n’avait aucun souci au monde. Il était presque vingt-et-une heures et, bien que ce ne soit pas bondé, il y avait tout de même quelques personnes. Syn essaya de ne pas jeter un coup d’œil furtif dans la pièce, gardant les yeux fermement ancrés sur la nuque de Furious qui les guidait vers un box, heureusement situé à l’arrière du bar, où il faisait un peu plus sombre. Syn s’assura de s’asseoir de manière à faire face à la porte pendant que Furi s’installait face à lui.
Celui-ci ne parlait pas. Il prit un des menus et commença à le consulter.
— C’est la première fois que tu sors en public avec un homme ?
La tête de Syn se redressa brusquement, émergeant de derrière son menu.
— Euh… Ouais, mais, tu sais ce que c’est...
— Non, je ne sais pas, répondit rapidement Furi. Si tu ne voulais pas sortir, pourquoi ne l’as-tu pas dit, tout simplement ? On dirait que tu es sur le point d’utiliser ton manteau pour te cacher. Ou prévois-tu de rester dissimulé derrière ton menu toute la putain de soirée ?
— Furious…
— Bien que cela risque d’être plutôt difficile pour manger. Dois-je me préparer à ce que tu me sortes que tu as soi-disant mal au ventre ?
— Ça suffit ! aboya Syn.
Les yeux sombres de Furi s’écarquillèrent à son ton.
— Écoute, lâche-moi un peu, tu veux ? Ce n’est pas nouveau pour moi de sortir avec des hommes. C’est la première fois que je sors avec quelqu’un, point final. Pendant toute ma vie d’adulte, je me suis concentré sur ma carrière, afin de devenir un bon flic. Je n’avais pas beaucoup de temps pour faire autre chose de ma vie, y compris pour sortir. Les rendez-vous amoureux demandent du temps et de la patience, deux choses que je n’avais pas. J’étais résigné à l’idée d’être seul le reste de ma vie, jusqu’à ce que je te voie. Je te veux et je suis plus que désireux de prendre le temps, et de faire des efforts pour être avec toi. Alors, pardonne-moi si je ne fais pas tout ce qu’il faut correctement lors de notre premier rendez-vous.
— Je ne m’attends pas à ce que tu le fasses. Je ne suis pas sorti de cette manière depuis des années non plus. Mais il y a une chose qui m’est totalement égale : c’est d’avoir honte.
Furi le fixa droit dans les yeux. Syn n’eut pas le temps de répondre qu’une serveuse arriva et déposa un ramequin de cacahuètes sur la table.
— Que puis-je vous servir à boire, les gars ? demanda-t-elle d’une voix enjouée.
— Je prendrai n’importe quelle bière d’automne que vous avez à la pression, dit Furious, attrapant une poignée de cacahuètes.
— Wow ! Vos cheveux sont si beaux. J’aimerais que les miens soient aussi épais. Puis-je les toucher ?
Elle tendit une main et passa ses doigts dans les cheveux de Furi sans attendre sa réponse.
Syn se hérissa pendant qu’il regardait la serveuse pulpeuse s’extasier devant la chevelure de son homme. Merde ! Il en était déjà à considérer Furi comme sien. Il leva les yeux vers lui et remarqua la lueur diabolique qui traversait ses prunelles. Il avait manifestement remarqué qu’il n’appréciait pas ce que faisait la serveuse. Il voulait être le seul autorisé à toucher cette magnifique crinière. Elle leva sa main pour une autre caresse et Syn lâcha :
— Je prendrai la même chose. Je meurs de soif, là.
Furious gloussa tandis que la serveuse s’éloignait afin de chercher leurs bières. Il adressa à Syn un regard incrédule.
— Sérieusement ?
— Je trouve que ce n’est pas très professionnel de faire ça, pas toi ? contra-t-il.
— De faire quoi ?
— Ne joue pas avec moi.
— Oh, je ne joue pas avec toi, intervint promptement Furi.
— Très bien. Ne le fais pas. Je ne laisserai personne d’autre me peloter quand je suis avec toi. Alors, empêche-la de te toucher à nouveau.
Furi haussa un sourcil devant le ton de Syn.
— Bien sûr, peu importe, mais elle ne me tripotait pas, Syn.
Furi se laissa glisser plus bas sur la banquette et tendit un bras sur le dossier. Son tee-shirt noir moulant se retrouva plaqué contre son torse, révélant les tatouages de ses deux bras contenant des dessins tribaux, quelques étoiles nautiques et une grosse moto sur son bras gauche. Syn se demanda ce qu’ils signifiaient tous, et combien d’autres étaient cachés sous ses vêtements. Furi le dévisageait sans dire un mot. Syn ferma les yeux et prit une profonde inspiration. Son sexe était déjà à moitié érigé et, avec Furi le fixant comme ça, il durcissait de plus en plus à chaque coup d’œil. Il sentit un pied frotter le sien sous la table, l’obligeant à lever les yeux vers Furi. Il plissa un coin de sa bouche.
— Là, c’est nettement mieux, déclara Furi de son timbre de voix profond. Tu es sexy en diable lorsque tu veux tout contrôler.
Syn se contenta de secouer la tête et de prendre une grande gorgée de la bière que la serveuse venait de déposer devant lui.
— Nous prendrons les ailes à volonté, s’il vous plaît, commanda Furi pour eux. Autre chose, bébé ?
Syn s’étouffa avec sa boisson devant le terme d’affection utilisé, provoquant non seulement un rire de la serveuse, mais également de son vis-à-vis.
— Très drôle ! Tu paieras pour ça plus tard.
— Je l’espère ! ronronna pratiquement Furi.
Après que leur serveuse ait déposé leur commande, la nervosité de Syn s’apaisa et ils se mirent tous deux à discuter tranquillement. Cela aidait qu’il n’y ait personne appartenant au commissariat dans l’établissement. Tandis que Furi mangeait et buvait, Syn lui raconta tout de la longue lignée de flics dont il venait, lui expliquant qu’il avait toujours voulu devenir détective.
Furi lui parla de son père comme étant le meilleur mécanicien avec qui il avait travaillé et qu’il allait gérer son garage de la même façon : avec intégrité et fierté. Ils rirent de ses séances de masturbation pour Illustra et des choses qu’il devait imaginer afin de parvenir à jouir. Syn dégrisa rapidement quand Furi confessa avoir songé à lui, à ses lèvres, à son odeur et à sa force. Il lui avoua combien il l’excitait.
— Idem, fut tout ce que Syn pouvait répondre, arrivé à ce point.
L’expression de Furi indiquait qu’il en avait assez de discuter et qu’il était prêt à passer à autre chose. Syn savait exactement ce que cela impliquait.
Il régla la note et ils se dirigèrent vers la porte, avec une brume de désir si épaisse autour d’eux que Syn ne put s’empêcher de se demander si quelqu’un d’autre pouvait la voir. Furi tendit la main et Syn fut heureux de la prendre. Il lui jeta un coup d’œil par-dessus son épaule et lui lança un clin d’œil séducteur lorsque Syn se rapprocha de lui. Dès qu’ils franchirent le seuil, il aperçut quatre membres de son équipe marchant sur le trottoir. Eh meeerde !
— Hey, Sarge.
Pendleton, son expert en démolitions parla le premier.
Syn lâcha brusquement la main de Furi et mit rapidement un peu de distance entre eux.
— Salut, les gars.
Ils s’arrêtèrent tous et jetèrent des regards curieux entre Furi et lui. Syn ne pouvait même pas regarder Furious droit dans les yeux après la réaction qu’il venait d’avoir.
Le détective Green se racla la gorge et pointa un doigt vers Furi.
— Est-ce que je vous connais ?
— À peine, marmonna-t-il.
— Euh… c’est… euh. C’est mon… euh…
Syn jura dans sa barbe. Manifestement, son équipe savait déjà qui était Furious. Ils possédaient tous la liste détaillée des acteurs de chez Illustra et l’apparence de Furious n’était pas de celle qu’on oubliait aisément.
— Sarge, qui est votre ami ? demanda le détective Ruxsburg, un sourire sournois s’affichant sur son magnifique visage.
— C’est… euh…
— Il s’en va.
La voix profonde de Furi résonna sèchement avant de s’éloigner, partant dans la direction opposée de l’endroit où était garé le véhicule de Syn.
— Merde ! murmura-t-il, le voyant tourner au coin de la rue.
— Vous feriez mieux d’aller le chercher et d’être prêt à vous humilier et à ramper plus bas que terre, indiqua son inspecteur, spécialiste en télécommunications, de sa voix calme et froide.
Syn ne répondit rien. Ses gars le contournèrent et entrèrent dans le bar, le laissant seul avec un profond sentiment de honte. Il songea à se précipiter après Furi, toutefois, il préféra monter dans sa voiture et lui couper la route. Il accéléra et se gara dans une allée, espérant l’intercepter, même s’il était en colère. Lorsque Syn sortit de son véhicule, Furi apparut, venant dans sa direction. Oh, bordel ! Il avait les mains enfouies dans ses poches et si la grimace qu’il arborait n’indiquait pas suffisamment clairement à quel point il était en colère, alors son choix de mots, lorsqu’il atteignit finalement Syn, le fit parfaitement.
— Fous le camp et reste loin de moi !
— Furious, je sais que tu es bouleversé…
Celui-ci fit brusquement demi-tour et le fusilla de ses yeux sombres.
— Bouleversé ! Bouleversé ! Regarde mon visage, bordel de merde ! À ton avis, suis-je simplement bouleversé ?
Syn leva les mains dans un geste apaisant.
— Très bien, tu es en colère et tu as toutes les raisons de l’être. J’ai très mal réagi là-bas. J’ai juste été pris par surprise.
Furi se dressa devant Syn, se retrouvant nez à nez avec lui, alors que des gens commençaient à s’arrêter pour les observer.
— Pouvons-nous, s’il te plaît, en discuter ailleurs ?
Syn tenta de pousser Furi vers l’allée, loin de ces connards de voyeurs.
— Putain, ne me touche pas !
— Je ne vais pas le faire ! Bordel, calme-toi. Je veux simplement t’expliquer… argua Syn.
Il semblerait que, chaque fois qu’il était près de Furi, il doive s’excuser de quelque chose.
— Je suis désolé, d’accord ? J’aurai dû te présenter correctement à mon équipe.
— Comment aurais-tu…
— S’il te plaît, Furious. Laisse-moi finir. J’aurais dû leur dire ton nom et indiquer, au minimum, que tu es mon ami. Je suis désolé. Je t’ai averti que je merdais totalement en ce qui concerne ces conneries de rendez-vous et si tu ne me dis pas d’aller me faire foutre et que tu me laisses une autre…
— Va te faire foutre ! l’interrompit Furi.
Il tenta de contourner Syn, mais celui-ci saisit son poignet et le plaqua contre le côté de sa voiture.
— Non ! Certainement pas ! Je préfèrerais te baiser.
— Eh bien, tu as fichu en l’air toute chance que tu avais, hurla aussitôt Furi.
— Vraiment ?
— Qu’est-ce que tu crois ? Sous prétexte que je suis un homme, cela te donne le droit de me traiter comme bon te semble ? Si j’avais été une femme, aurais-tu agi comme ça devant ces gars ?
Syn détourna son regard, connaissant la réponse à cette question et c’était un “non” retentissant.
— Réponds-moi !
— Probablement pas, admit-il. Pardonne-moi. Je n’aurais pas dû te faire ça. Tu ne mérites pas d’être traité com…
— Tu as foutrement raison : je ne le mérite pas. Je ne serai jamais ton sale petit secret, Syn.
Furi pointa un doigt vers son visage.
— Lorsque tu m’as demandé de sortir avec toi, je t’ai dit d’être prêt et je le pensais. Je ne suis pas dans le placard, je ne le suis plus depuis plus de quinze ans et je ne vais pas y retourner pour toi, ni pour quelqu’un d’autre.
— Furious, je ne suis pas dans le placard et je ne veux pas l’être non plus. Mon équipe est composée de bons gars et j’aurais dû savoir qu’ils n’auraient pas réagi comme des connards, mais je suis encore nouveau parmi eux. Je n’en ai pas beaucoup révélé sur moi-même parce que je suis du genre secret, c’est tout ce que c’était. Je ne sais vraiment pas comment réagir dans ce genre de situations.
Syn remarqua que la colère de Furi s’était légèrement apaisée, il en profita donc et passa ses bras autour de sa taille. Furi tenta de le repousser, tout en mettant très peu de force dans ses gestes. Syn enfouit son visage dans ses cheveux.
— Pardonne-moi, Furi.
— Ramène-moi juste chez moi, marmonna-t-il, se libérant et s’approchant du côté passager.
Le trajet de retour fut mortellement silencieux. Syn ne savait pas si Furi allait lui pardonner ou non, toutefois, il l’espérait, car il l’appréciait vraiment. C’était le genre d’homme avec lequel il voulait passer des heures à discuter parce que sa voix grave et sexy provoquait des réactions étonnantes dans son aine, et l’entendre rire était la plus douce des musiques à ses oreilles. Il voulait voir le magnifique visage de Furi quand il rentrerait à la maison, après avoir travaillé sur des affaires merdiques, sachant qu’il se sentirait mieux. Il désirait se glisser dans le lit avec lui après avoir pris une bonne douche chaude, pour enfouir son visage dans ses cheveux doux et, simplement se perdre dans l’odeur érotique qui émanait de ses belles mèches.
Syn lutta contre le besoin de s’excuser à nouveau, il l’avait déjà fait au moins cinq fois jusqu’à présent. Il lui jeta un coup d’œil, souhaitant pouvoir vraiment le contempler.
— Vas-tu dire quelque chose ?
Furi se tourna enfin vers lui, mais ce qu’il dit n’était pas exactement ce que Syn désirait entendre.
— Ta voiture a besoin d’un réglage.
Puis il tourna la tête vers la vitre à nouveau. Syn se gara contre le trottoir opposé à l’appartement de Furi et coupa le moteur. Son invité n’ajouta rien, il ouvrit simplement la portière, sortit du véhicule et traversa la rue.
Syn bondit et l’appela.
— Furi, s’il te plaît… attends !
Celui-ci s’arrêta au milieu de la rue et se positionna face à lui, paraissant totalement exaspéré.
— Quoi ?
Syn contournait son véhicule quand il entendit soudain des pneus crisser et vit les phares d’une voiture se diriger droit sur Furi.
— Furious ! hurla-t-il, notant qu’il n’avait pas de temps à perdre.
Il s’élança à pleine vitesse, puis bondit et le saisit, manquant de peu les pare-chocs de la voiture. Syn roula avec Furi, dans un mélange informe de bras et de jambes, heurtant durement le trottoir. Il garda un bras autour de lui, avant de relever la tête afin d’essayer de voir où se trouvait la voiture. Tout ce qu’il put discerner fut l’arrière du véhicule sombre et deux lettres de la plaque d’immatriculation. Il saisit son Smith et Wesson à l’arrière de sa ceinture, juste au cas où le véhicule ferait demi-tour.
Il se releva rapidement, tirant Furi vers lui.
— À l’intérieur ! Tout de suite !
Furi avança rapidement, Syn sur les talons. Dès qu’ils se retrouvèrent à l’intérieur de l’appartement, Syn l’obligea à lui faire face. Il l’examina en détail, avant de déterminer qu’il allait bien, enfin à peu près. Furi paraissait être en état de choc, et à juste titre, puisque quelqu’un venait juste de tenter de le tuer. Syn posa ses deux mains sur les joues rouges de Furi.
— Furious, regarde-moi.
Il attendit que ses yeux, désormais hantés, se concentrent sur lui. Lorsque Furi y parvint, Syn passa en mode “flic” et posa des questions tant que les détails étaient encore frais dans son esprit.
— Ton mari conduit-il une BMW ou une Mercedes ?
— Quoi ? murmura Furi.
— Cette voiture qui vient juste d’essayer de t’écraser était une Mercedes, ou peut-être une BMW. Est-ce ce genre de véhicule que conduit ton mari ?
Syn essayait de parler aussi clairement qu’il le pouvait.
— Non, il ne conduit jamais. Il a des chauffeurs.
Syn tira son portable et appela le commissariat. Il le vit se laisser tomber sur le canapé et frotter ses deux mains sur son visage. Il donnait son numéro de plaque à l’opératrice, quand soudain la tête de Furi réapparut brusquement, paraissant effrayé.
— Attends ! As-tu dit une Mercedes foncée ?
Syn demanda à l’opératrice de patienter.
— Oui. Connais-tu quelqu’un qui conduit une Mercedes noire ?
— Ouais.
Furi le dévisagea.
— Sasha Pain d’Illustra possède une Mercedes noire.
Syn reprit la ligne.
— J’ai besoin d’un avis de recherche pour une Mercedes noire, se dirigeant vers l’est sur Clifton Road, à Emory Point. Les deux premières lettres de la plaque sont Bravo, Tango.
Syn termina avec le central, puis appela son premier officier. Pendant qu’il attendait qu’on lui réponde, il ordonna à Furi de préparer un sac avec tout ce dont il aurait besoin pour les prochains jours. Celui-ci ne bougea pas.
— Furious ! grogna Syn.
Il voulait foutre le camp de cet appartement, au cas où Sasha voudrait revenir finir le travail.
— Je ne pars pas. Elle ne va pas m’obliger à m’enfuir de mon propre putain d’appartement !
Furi releva le menton, d’un air plein de défi.
Syn oublia tout de son appel téléphonique et s’approcha, se tenant directement devant lui.
— Va préparer un sac. Tout de suite. Cette folle n’aura pas la moindre autre chance si j’ai quoi que ce soit à dire à ce sujet.
— Tu n’as rien à dire à ce sujet.
— Je m’en fous ! aboya Syn. Ta foutue fierté te fera tuer. Occupons-nous d’elle, puis tu pourras revenir chez toi sans problème. Ne laisse pas ton entêtement faire de toi une cible facile, parce que c’est tout simplement stupide.
— Viens-tu de me traiter de stupide ? rétorqua Furi.
Syn roula des yeux de frustration.
— Putain, tu te fous de moi ? Furious, nous n’avons pas le temps pour ces conneries pour l’instant. Va chercher tes merdes et sortons de là.
Il se dirigea vers la seule fenêtre de l’appartement et resta là à observer pendant que Furi jetait quelques vêtements, affaires de toilette, livres et un ordinateur portable dans un sac, grommelant tout le temps des jurons. Syn le laissa dire tout ce qu’il voulait, tant qu’il faisait ce qui était nécessaire.
Furi avait un grand manteau drapé sur son épaule quand il revint se tenir devant lui.
— Prêt, détective. Y a-t-il autre chose que vous voulez m’ordonner de faire ?
Syn prit une rapide inspiration afin de se calmer. Il saisit le manteau et le laissa lentement tomber à ses pieds. Il passa un bras autour de la taille de Furi et l’attira à lui.
— Je n’essaie pas de te donner des ordres. Je ne peux pas laisser quelqu’un te faire du mal.
Syn ferma les yeux.
— Je ne le prendrais pas bien si tu étais blessé alors que je savais que j’aurais pu faire quelque chose pour l’éviter. Je dois suivre mon instinct. Je lui ai toujours fait confiance et il m’a sauvé à plusieurs reprises. Et il me dit de ne pas te laisser seul ici ce soir, alors tu viens chez moi. Je ferai arrêter Sasha dans la matinée et une ordonnance restrictive sera signée à l’encontre de ton ex. À la suite de ça, si tu ne veux plus jamais me revoir, je comprendrai.
Syn fut si soulagé lorsque Furi se pencha en avant et l’étreignit.
— Ça fait un peu trop, tu sais ? Je ne suis personne, juste un foutu mécanicien. Pourquoi diable est-elle après moi ?
Son souffle effleura la peau hérissée de la nuque de Syn.
Il recula afin de croiser le regard effrayé de Furi.
— Conneries ! Tu n’es pas “personne”. Ne redis jamais ça. Tu es… tu es…
Syn ne savait pas vraiment ce qu’il était prêt à admettre pour l’instant, ni s’il pouvait exprimer ce qu’il ressentait pour Furi. Tu es important pour moi. Une chose était certaine, bien que son instinct protecteur tourne à plein régime pour cet homme, il y avait quelque chose d’autre là, ondoyant juste sous la surface. Il ne dirait pas que c’était de l’amour, c’était foutrement trop tôt, d’autant qu’il n’avait jamais été amoureux, alors, il n’allait certainement pas galvauder ce mot à la légère. Toutefois, il n’était pas prêt pour que Furi sorte de sa vie, de manière permanente. Cette idée le rendait malade.
— Je suis quoi, Syn ?
Celui-ci cligna des yeux. Il devait terminer ce qu’il avait commencé à dire.
— Tu es assez fort pour gérer ceci et en sortir victorieux.
Syn le serra à nouveau.
— Viens, nous devons y aller.
Quand ils furent de retour dans la voiture, se dirigeant vers chez lui, Syn demanda par radio à ce qu’une voiture patrouille la zone autour de l’appartement de Furi, parce qu’il était inquiet pour sa propriétaire. Au moment où ils arrivèrent de son côté de la ville, Ronowski appela pour indiquer que sa demande de recherche serait effective pendant vingt-quatre heures, et que personne n’avait encore arrêté Sasha.